Professeur Emmanuel Toh Bi : «La Côte d’Ivoire ne sera plus un pays béni de Dieu si on s’entredéchire»

Article : Professeur Emmanuel Toh Bi : «La Côte d’Ivoire ne sera plus un pays béni de Dieu si on s’entredéchire»
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3 janvier 2023

Professeur Emmanuel Toh Bi : «La Côte d’Ivoire ne sera plus un pays béni de Dieu si on s’entredéchire»

Le Professeur Emmanuel Toh Bi, à l’orée de l’année 2023, nous a accordé une interview. Président de l’Ivoironie, un concept de rassemblement autour des valeurs chères à la Côte d’Ivoire, il a organisé une Assemblée Générale à Dabou. Nous y étions et avions profité pour lui tendre notre micro.
Crédit photo : Toh Bi

Bonsoir Professeur Emmanuel Toh Bi. Nous sommes aujourd’hui à la veille de 2023, et vous tenez une Assemblée Générale qui à Dabou. Quelles sont les motivations de cette activité ?

Bonsoir. Je suis Emmanuel Toh Bi, écrivain poète et dramaturge, concepteur de l’Ivoironie. Il se passe qu’un comité est né à partir de ce concept dans le but de le promouvoir. Et ce comité a vu officiellement le jour le 11 septembre 2021, soit un an deux mois à peu près, à la faveur d’une Assemblée Générale constitutive qui était destinée non seulement à faire naître le mouvement, la structure associative, mais aussi la doter de certaines instances culturelles.

Aujourd’hui nous sommes à notre première Assemblée Générale ordinaire, question d’élaborer le bilan et à mi-chemin, de revoir d’éventuels amendements de nos textes. Ensuite procéder à certaines nominations, sans oublier essentiellement la majorité des actions de l’année 2023. C’est de cela qu’il a été question aujourd’hui à cette Assemblée Générale ordinaire du comité national de l’Ivoironie que je préside.

À découvrir : Focus Ivoironie

Pour ceux qui vous découvrent pour la première fois, pouvez-vous leur expliquer ce que c’est que l’Ivoironie ?

L’Ivoironie est un concept d’ouverture populaire, raciale et sociale. Seul son slogan peut permettre de la capter intellectuellement : « Au milieu de nos différences, soyons d’accord sur ce qui ne nous différencie pas. »

En d’autres termes, nous sommes différents politiquement, ethniquement, religieusement, mais nous sommes d’accord sur l’essentiel : Félix Houphouet Boigny, le Mont Nimba, le fleuve Comoé et le mirage de la ville historique de Grand-Bassam. Aussi sommes-nous d’accord sur nos belles plages, notre drapeau orange blanc vert, l’hymne national et l’équipe nationale.

Alors l’Ivoironie est donc créé pour emmener les ivoiriens à signer à l’unisson, le pacte consensuel de la Côte d’Ivoire. Dans le but que les différences politiques ethniques et religieuses soient négligées afin que soit souveraine la signature de l’essentiel qui nous met tous d’accord. La question m’a été posée une fois au sujet de l’Ivoironie : « Est-ce que ce sont seulement les ivoiriens qui sont concernés ? »

« Au milieu de nos différences, soyons d’accord sur ce qui ne nous différencie pas. »

Non, l’Ivoironie veut que la Côte d’Ivoire soit comme les États-Unis, la France, l’Angleterre et le Japon. C’est-à-dire que ce qui importe, c’est le magma, la matière, la base, c’est l’ancrage. En d’autres termes, c’est la nation Ivoirienne, la terre de Côte d’Ivoire. Qu’on soit d’origine Ivoirienne, burkinabé, française, le plus important, entendons-nous, mettons nous d’accord sur la Côte d’Ivoire qui nous profite à tous. Faisons-en la promotion, la publicité, afin qu’à partir de la Côte d’Ivoire, naisse une solidarité africaine très très forte. C’est un pays qui joue un rôle très important en Afrique de l’ouest.

Mais les ivoiriens à travers l’Ivoironie, ne veulent pas s’arc-bouter sur le pays, ils veulent plutôt que le pays soit fort à partir de leur entente, leur unité. Et que cette unité soit proposée en termes d’exemple à la sous-région, à l’Afrique et au monde. Ivoironie donc, pour qu’à partir de la Côte d’Ivoire naisse une microcivilisation à terme, une civilisation puissante.

Comment vous arrivez à obtenir des adhérents à votre concept ? Je constate qu’il y a beaucoup de membres de niveau doctorat. Est-ce limité qu’aux intellectuels ?

Ce qu’il faut savoir, c’est que je suis à la fois fier et gêné de la pléiade de docteurs qu’il y a dans le comité national de l’Ivoironie. Mais ce qui me soulage, c’est qu’ils sont devenus docteurs étant dans le comité.
Ils n’ont pas été recrutés sur la base des critères de docteur. Ils sont devenus docteurs pendant qu’ils militaient déjà. Comme quoi, l’Ivoironie, ça incite à une émulation au travail, parce que le travail justement, est l’une des vertus de l’Ivoironie.

L’Ivoironie demande que les fils et les filles de Côte d’Ivoire, d’origine ou d’adoption, s’entendent autour de nos valeurs patrimoniales, de nos vertus communes, qu’on puisse avoir la paix pour travailler.

Donc l’Ivoironie est la création d’un climat de paix civique et culturel, à l’effet de favoriser le travail intense qui seul peut engendrer l’éclosion, l’émergence ou le développement.

Crédit Photo : Toh Bi

Déjà ils adhèrent au concept parce qu’à l’université, je suis leur modèle. Étant là, ils copient des exemples. En lisant les chroniques que j’écris sur notre plateforme WhatsApp, ils apprennent beaucoup. C’est l’aîné que je suis à qui ils veulent ressembler. Alors en bossant, ils finissent par devenir docteur. Mais il n’y a pas que des docteurs, il y a toutes les catégories de personnes au sein de l’Ivoironie.

Vous êtes au nombre de combien d’ivoironifans à ce jour ?

Nous sommes actuellement à environ cinquante adhérents, pour ceux qui ont décidé de s’engager à acheter une carte de membre, et participent aux cotisations. Sinon nous avons une pléthore de sympathisants à travers le pays. Partout où nous passons, il y a beaucoup de gens qui sont intéressés. Il faut donc que tout le monde s’engage.

En un an deux mois, quel est votre bilan en termes d’actions sur le terrain ?

D’abord, nous sommes nés officiellement le 5 Juin 2017 à l’université de Bouaké à la faveur d’une cérémonie intitulée  » Lecture du Manifeste de l’Ivoironie ». Le temps est passé, jusqu’à ce que le comité qui s’est dressé autour du concept naisse officiellement le 11 Septembre 2021.

En un an, le bilan en termes d’activités, est satisfaisant. Nous avons organisé le jeu concours Ivoironie des lycées et collèges de Yamoussoukro qui a rassemblé plus de deux mille élèves. En présence des personnalités éducatives, culturelles et civiques. Le lancement a eu lieu à l’école BAD le 9 mars 2022. Les présélections ont eu lieu dans la même école et aussi au lycée scientifique. La finale s’est tenue le 11 Mai à l’éditorial Mamie Adjoua de Yamoussoukro. L’ambiance était féerique. J’étais heureux de voir les jeunes de Côte d’Ivoire s’extasier autour de la culture, de la musique de leur pays.

Crédit : Facebook – Focus Ivoironie

On leur posait des questions auxquelles ils répondaient. Le jeu concours a porté sur la culture générale et la poésie orientées sur la Côte d’Ivoire. On les interrogeait sur la musique, le football, la sociologie, la géographie, la gastronomie, sur l’histoire de la Côte d’Ivoire en général. Et c’est le lycée scientifique de Yamoussoukro qui est sorti vainqueur de ce jeu concours. Cet événement nous a apporté grande satisfaction, car cela a permis de faire connaître l’Ivoironie à Yamoussoukro et peut-être dans tout le centre du pays.

Aussi, on peut noter quelques passages télévisés. Le service de communication du comité national de l’Ivoironie a favorisé mon passage au journal télévisé de 20 heures, le samedi 5 novembre 2022.

Ensuite il y a eu quelques rencontres avec les étudiants. Des séances d’explication du concept de l’Ivoironie entre le concepteur et les étudiants à l’université de Bouaké. Voilà ce qu’on peut retenir de façon majeure en termes d’activité du comité national de l’Ivoironie en 2022. Sinon il y a eu des activités périphériques.

« L’année 2023 est encore prometteuse. »

L’année 2023 est encore prometteuse. Le jeu concours Ivoironie sera à nouveau organisé. Nous prévoyons aussi des conférences, des matchs de football, baptisés « Ivoironie Pour Tous ». Afin que le concept ne soit pas que intellectualiste, mais qu’il soit aussi populaire. Nous le voulons populaire pour que les Ivoiriens soient un peuple uni autour de ce prétexte ivoiro-doctrinal qu’est l’Ivoironie.

Lorsqu’on vous regarde, on a l’impression que vous êtes le sosie de l’ex-Préfet d’Abidjan, Vincent Toh Bi. Êtes vous parentés ?

Je ne suis pas son sosie, je suis son jeune frère. D’aucuns disent que nous sommes jumeaux, mais je viens plutôt juste après lui. C’est quelqu’un que j’admire beaucoup, c’est mon grand frère, c’est mon ami, c’est mon modèle. C’est peut-être de lui que je tiens cette fibre idolâtre à la littérature.

Et justement pour parler de lui, on constate que vous avez des plumes un peu similaires. Vous écrivez très bien sur les différentes plateformes, notamment Facebook où vous êtes beaucoup suivis.
Et particulièrement, il a un mouvement qui ressemble aussi à votre concept, Aube Nouvelle… Aube Nouvelle et Ivoironie, des mouvements sosies ?

Crédit Photo : Toh Bi

C’est une coïncidence qui est peut-être liée à notre passé. Nous avons eu un passé difficile. Ce que lui et moi faisons, c’est peut-être le fruit d’une psychanalyse. C’est la résultante de notre passé de meurtrissures, d’agonie même, qui fait qu’on en souffre aujourd’hui de paix.

Cette souffrance est spécialement sur le plan familial. Nos parents étaient divorcés, alors qu’ils étaient eux-mêmes très modestes socialement. Ça fait qu’on a broyé du noir. On a supporté la pesanteur de l’existence. J’en parle même dans l’une de mes œuvres poétiques  » Aurore d’Afrique à Sanoudja « .

Je pense que le fait d’avoir réussi au milieu de la grisaille sociale, ça nous a irradiés. Ça nous a fait comprendre que l’effort paie toujours. Ça nous a fait comprendre la nécessité de prôner la paix. Et que ce n’est pas parce que c’est difficile pour toi socialement qu’il faut basculer dans la drogue, la prostitution, la gabegie, le dérèglement ou la dissolution. Au milieu de la grisaille, on peut se tirer d’affaire. Mon frère et moi et nos autres frères et sœurs, avons vraiment souffert.

On a failli partir, y laisser la vie dans une Côte d’Ivoire pourtant qui était très en paix et prospère, puisque c’était sous l’ère du Président Houphouet-Boigny. Mais c’est la vie. Ça fait partie de la réalité sociale. C’est le fait social, il faut des riches, il faut des pauvres. On s’est battus, on y a cru, on a cru en Dieu et au travail.

« On s’est battus, on y a cru. On a cru en Dieu et au travail. »

Donc si mon frère tout comme moi, est entrain de prôner la paix, la réconciliation, ça se comprend. On est en train de rattraper le passé. On tente de rectifier un passé qu’on ne veut plus voir, ni au niveau de la famille, ni au niveau national.

Est-ce évident de rassembler des gens issus de différentes ethnies, de différentes cultures ? Votre dernier mot…

Je pense que l’Ivoironie est en elle-même un message à la Côte d’Ivoire. Parce qu’elle amène les ivoiriens à comprendre la nécessité de se mettre ensemble autour de l’essentiel.

Car nous avons des valeurs qui ne doivent pas être détruites. Nous avons le troisième pont HKB, Drogba Didier, l’Hôtel Ivoire, l’autoroute Abidjan-Yamoussoukro, la Basilique, la Cathédrale, le mirage des immeubles du Plateau, des sites touristiques et des places balnéaires très oniriques qui font rêver.
Nous avons des valeurs !

Alors quand quelqu’un se détruit parce qu’il n’a pas d’espoir, on peut dire à la limite qu’il avait des raisons de le faire. Mais se détruire pendant que tu as des acquis à en profiter, c’est le désastre, ça ! La Côte d’Ivoire a des acquis dont les fils et les filles de Côte d’Ivoire doivent en profiter.

Mettons-nous d’accord non sur un même parti politique, mais sur l’essentiel civique et culturel, le mirage, la gloire de la Côte d’Ivoire, l’idolâtrie de la paix pour profiter de cette belle nature, ces qualités artistiques hors norme. La Côte d’Ivoire est un pays, il faut le dire, béni de Dieu. Mais il ne le sera plus, si on s’entredéchire pour des intérêts égocentriques. D’ailleurs, je ne crois pas que les intérêts égocentriques satisfassent même les citoyens d’un même clan. Aujourd’hui je ne pense pas que tous les citoyens RHDP du pays soient satisfaits socialement de l’accession au pouvoir de leur parti. Ça, c’est naturel. Il ya toujours des mécontents. Quand le FPI était au pouvoir, je ne pense pas que pratiquement tous ses partisans en avaient pleine satisfaction. C’est pareil pour le PDCI. L’insatisfaction est naturelle. Alors pourquoi donc s’entredéchirer pour quelque chose qui nous satisfera pas tous au sein du même parti ? Entendons-nous donc sur l’essentiel.

L’ivoironie est donc ce terrain consensuel sur lequel les différents partis politiques, même les Ivoiriens non marqués politiquement, peuvent se retrouver pour parler Côte d’Ivoire, en tant que terre d’espérance pour les Ivoiriens et les voisins de la Côte d’Ivoire, et pour l’Afrique, et pour le monde. La patrie de la vraie fraternité, on ne pourra pas la construire si on s’entredéchire.

« L’ivoironie est donc un terrain consensuel. »

Entendons-nous sur le fait que le monde nous regarde. Nous sommes une espérance pour l’humanité. Et s’entredéchirer serait être un dépit pour nous, mais aussi pour toute la terre entière. Voilà pourquoi j’ai initié l’Ivoironie, pour dire aux Ivoiriens, ce serait presque la fin du monde si vous vous entredéchirez en dépit de ces qualités qui font rêver plus d’un.

Entendons-nous, profitons-en tous et donnons une leçon au monde. Car le monde a besoin de paix.
L’Ivoironie est un cantique à la paix et à la réconciliation. Je dis aux Ivoiriens que je les aime, et que l’Ivoironie n’est plus mon concept. Il est leur concept, car il est le consensus de leur patrimoine, le terrain d’entente de leurs vertus ancestrales.

La Côte d’Ivoire donc, en tant que pays, est un message à l’Afrique et au monde. Et l’Ivoironie vient doctrinalement systématiser ce vœu pieux de la nation Ivoirienne.

Interview réalisée par Louis-César BANCÉ

Ceci est ma bio, je n’ai pas commencé à l’écrire.

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Commentaires

Le GRIOT NOIR DU SOIR
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Exceptionnel ! Merci infiniment Maître ! Merci de tracer les sillons d'une belle Côte des Ivoires, ma Côte D'IV'ART !